Francis RIÉRA 1935-2018

Compagnon de l’Alouette - Pionnier du GH

Publication : 3/05/2018 Auteur(s) : Francis


Francis RIERA aux commandes de l'Alouette II de Grenoble-Eybens en 1962 - Photo DR GHSC Base de GrenobleC’est avec beaucoup de regrets que nous avons appris la disparition de Francis Riéra, car ces dernières années, il n’avait jamais hésité à nous fournir tout ce qui lui était possible en matière d’anecdotes et de souvenirs personnels pour satisfaire et alimenter nos recherches historiques sur le Groupement hélicoptère de la Sécurité Civile.

C’est à Casablanca au Maroc que Francis est né le 11 avril 1935.
Dès son plus jeune âge, il s’intéresse à l’aviation et décroche une bourse de l’Armée de l’Air pour passer son Brevet de pilote sur avion de tourisme l’année de ses 18 ans.

La base école 725 du Bourget-du-Lac - Photo DR carte postale CIMLe 1er août 1955, il s’engage pour cinq ans. Après l’Ecole de Marrakech et celle du Bourget-du-lac (Base école 725), il obtient, le 4 juillet 1957, son brevet de pilote hélicoptère de l’Armée de l’Air N° 129.
C’est à cette époque et à partir de cette base que s’envole l’hélicoptère Sikorsky S-58 (H-34) chargé d’effectuer le secours en montagne de Vincendon et Henry qui aboutira à une nouvelle organisation nationale des secours, officiellement reconnue.

De 1957 à 1960, il vole sur hélicoptères lourds en Algérie. Dans le cadre de ce qu’on appelait le maintien de l’ordre, il effectue 21 missions de secours héliporté et ramènera 54 combattants blessés, dont plusieurs sous les tirs des rebelles.
Le 4 juillet 1959, son appareil est abattu sous les balles d’un fusil mitrailleur dans la région d’AÏN SEFRA. Malgré tout, il demande par la suite son maintien en opération dans la région pendant 36 mois et avant de quitter l’armée, vaillamment décoré, il passe son brevet de pilote professionnel hélicoptère le 11 mai 1960.

C’est en février 1961 qu’il entre dans la Police nationale. Sorti Major de l’Ecole de Sens, il est affecté à la Compagnie Républicaine de Sécurité de Lyon, puis il rejoints très vite le Groupement Aérien de la Protection civile, le 1er novembre 1961.

Francis RIERA et Gabriel Montmasson sur le perron de la base Protection civile Grenoble-Eybens sur l'aérodrome Jean Mermoz en 1962 - Photo DR collection Famille RouetEn janvier 1962, en raison de son expérience aéronautique, il est affecté à la Base Hélicoptère Protection civile de Grenoble-Eybens à partir de laquelle il effectue de nombreuses missions de secours en montagne. C’est tout d’abord en Alouette II puis sur Alouette III après une toute première affectation de cet appareil à la Protection civile.

Le 18 mars 1962, il intervient aux commandes de son Alouette II sur la télécabine de La Clusaz dans des conditions difficiles en secourant cinq personnes blessées. A cette époque, c’est l’Alouette II de Grenoble qui intervient sur le département de la Haute-Savoie et le massif du Mont-Blanc.

Le 11 août 1963, à bord de l’Alouette III F-ZBAL récemment affectée à Grenoble- Les débuts de la DZ des Bois en 1964 - Photo DR Famille ROUETEybens, il se porte sur les lieux du crash de l’Alouette II F-ZBAC de la Base. Les trois corps, dont celui de son collègue pilote Pierre Wattebled, sont récupérés.

En avril 1964, il participe à la création de la Base d’Annecy et reste au sein des équipages jusqu’en 1970. C’est principalement cette période mémorable que décrira Jean-Louis Lumpert l’auteur du livre " Les Compagnons de l’Alouette ".

Après négociations avec le conseiller municipal chamoniard Michel Doubray, Francis Riéra est le premier à déterminer un emplacement officiel et définitif pour les posés et le stationnement des hélicoptères de passage Alouette 3 F-ZBAS en livrée kaki Protection civile avec équipage Francis RIERA et Jacques BERARD à Annecy vers 1965 - Photo Pierre Mercier-Guyondans la vallée. Cet endroit s’appellera désormais La "DZ des bois". Jusqu’alors, pour ne pas toujours déranger le même voisinage, les pilotes se posaient un peu n’importe où. Aux "Favrands", c’était dans le champ d’un particulier, puis il y a eu la carrière "Cachat" mais rien n’était bien défini puisque l’Alouette II s’est même retrouvée un beau matin, sur la place principale au beau milieu du marché dans Chamonix

Le 25 août 1965, l'équipage RIERA-ROUET récupère les deux alpinistes autrichiens gelés avec l'Alouette III de la Protection civile pour les déposer sur la DZ des Bois - Photo DR Famille ROUETLe 25 août 1965, rejeté par deux fois au fond de la vallée du coté italien, il parvient à se poser au sommet du Mont Blanc après six tentatives, pour récupérer deux alpinistes autrichiens victimes de graves gelures.

En été 1968, après une intervention pour récupérer un alpiniste sur la paroi de la Grande Rocheuse, ce secours constitue dès lors un record d’hélitreuillage en altitude (4000 m).

En 1969, il reçoit la Médaille d’Or pour actes de courage et de dévouement.

Du 6 au 10 avril 1969, il réalise seize secours en montagne en sauvant dix-neuf personnes dont un randonneur allemand victime d’une fracture ouverte après une chute au fond d’une crevasse, ceci malgré une météo très défavorable (vent et neige).

Les équipages de la Base de Nice posent devant l'Alouette 3 F-ZBDQ dans les années 80, avec de gauche à droite : MAIFRET (administratif), MERLE (méca. nav.), RIERA (Pilote), DURAND (Pilote-Chef de Base), MONTINI (Resp.Méca.), MINVIELLE (Méca. Nav.), BEAUMARD (Pilote) et DUCHATEL (Méca. Nav.) - Photo DR collection Marck Duchatel Le 25 juillet 1969, il parvient à secourir un alpiniste en grande difficulté dans la face nord des Grandes Jorasses malgré un danger imminent de chutes de pierres.

Affecté à la Base de Nice le 1er avril 1971, il effectue dans cette région d’autres secours en montagne, de nombreuses missions de secours en mer et vols au profit des feux de forêt.

Le 24 juillet 1973, malgré une mer démontée, il retrouve et récupère par hélitreuillage deux passagers d’un avion de tourisme abîmé en mer au large d’Antibes.

Francis RIERA aux commandes de l'Alouette 3 F-ZBBP lors d'un stage dans la baie de Nice, années 80 - Photo DR collection Francis DelafosseLe 6 mars 1980, guidé par le radar de l’aéroport de Nice, il rejoint au large un avion bimoteur en détresse, assiste à son amerrissage en catastrophe et récupère par hélitreuillage le pilote seul occupant juste après qu’il se soit jeté à l’eau.

Le 24 mars 1981, il parvient à secourir deux jeunes alpinistes en difficulté juste sous le sommet de l’Argentiéra, à la demande du secours en montagne italien.

Francis aura effectué près de 500 sauvetages et secours héliportés, excellent pilote, toujours volontaire pour les missions les plus délicates. Ses collègues et amis lui reconnaissent une humeur toujours égale, un parfait esprit de camaraderie et une grande De gauche à droite : Marck DUCHATEL (Mécanicien), au centre Jean CLÉMENÇON (Pilote) et Francis RIERA (Pilote) ; Alouette III F-ZB__ Sécurité civile en arrière-plan lors d'une pause au refuge de la Valmasque (06) dans le Parc du Mercantour, en 1987 - Photo DR collection Marck Duchatel simplicité.

En décembre 1993, il est fait Chevalier du Mérite national.

Avec cette disparition survenue le 18 avril dernier, c’est encore un vétéran, un pionnier des hélicoptères Sécurité civile, un compagnon de l’Alouette qui nous quitte et nous manquera beaucoup.

F. DELAFOSSE

Messages

  • Beaucoup d’émotion d’apprendre que Francis n’est plus là. Fils de Louis
    Maret, j’ai très bien connu Francis, pendant de longues années. Nous avons eu à l’occasion de nous retrouver, grâce à l’invitation de la base du Versous pour le 60ème anniversaire. Merci à vous pour ces bons moments. Aujourd’hui je présente à toute sa famille mes sincères condoléances.
    Cordialement..

  • Je salue et remercie chaleureusement Chantal DROUBAY et Josiane CORANTI la nièce de Francis pour tous ces renseignements qui nous ont permis d’effectuer la rédaction de cet hommage.

  • Merci a Francis et aux divers collaborateurs qui ont permis avec talent de rédiger la Biographie d un des derniers "Compagnons de l’Alouette "

    Depuis quelques temps Francis se battait avec courage et détermination contre sa santé défaillante ,si 83 ans commence à ètre un bel age nous aurions aimé ,pour sa disponibilité et ses témoignages le garder encore un peu parmi nous .Je retiendrais pour ma part l’image d’un Grand Professionnel d’un abord facile ,chaleureux ,amical pour qui la notion d’équipage avait le sens de la solidarité nécessaire pour la réussite et l’efficacité de nos missions .Un parcourt atypique ou il frola très souvent les limites assumées ,lui assurèrent respect et admiration du milieu "Montagne Mer " Pour avoir partagé quelques missions délicates j’ai apprecié sa grande humilité et humanité .

    • Un grand Merci, Marc, pour ton touchant message témoin d’une sincère amitié pour Francis RIERA.
      Chris

    • Émotion toujours présente en pareil cas ,celui d’un ami qui à décidé de lâcher prise ,une carrière retracée conforme à son engagement et un portfolio de qualité agrémentant les souvenirs chauds et tenaces de quelques compagnons ayant partagé, joie mais aussi infortune, de ce milieu particulier du Sauvetage .

      Merci pour ces multiples articles qui nous font revivre ce pour quoi nous étions destinés !

  • Je viens tout juste d’apprendre cette triste nouvelle sur le bulletin de la ville de Nyons.
    J ai eu l’occasion de le rencontrer au sein de l’association @soft de Nyons où je donnais des cours en informatique. Jeme souviens d’une personne passionnée (nous avions mçeme fait un montage photo pour son fond d’écran d’ordi avec un Spitfire en toile de fond.
    Et bien sur les anecdotes de ses vols de nuit à bord de son simulateur de vol !!! Paris New York depuis son salon !
    Francis vous allez me manquer
    Je vous souhaite de bons vols dans le ciel que vous connaissez tant, adieu

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