L’activité des Fenwick-Bell G2 d’Hélicoptère-Service Briand en 1957 dans les Alpes

vendredi 28 août 2020

En mars 1957, un hélicoptère Fenwick-Bell G2 de le SA Hélicoptère-Service Briand et deux pilotes assurent des navettes pour transporter les skieurs entre les quais de la gare SNCF de Bourg-Saint-Maurice et la station de sports d’hiver de Val d’Isère. Des transports de skieurs furent également réalisés en hélicoptère entre Val d’Isère et les points de départ des principales piste de descente. Ce fut un gros succès, 1.600 passagers en deux mois, Jean-Pierre Briand l’instigateur de cette réussite pense développer ces transports en hélicoptères au cours de la prochaine saison hivernale vers les stations de Megève et de l’Alpe d’Huez avec un autre hélicoptère de la même marque.
Lors de son séjour dans la région de Val d’Isère, l’hélicoptère de Jean-Pierre Briand avait été utilisé pour le transport de plus de trente tonnes de matériel entre cette station et un point situé au-dessus du Plateau des Tommeuses, à l’altitude de 2.400 mètres, pour l’édification de la gare de départ du téléphérique du lac de Tignes. A chaque rotation d’une durée de 4 à 6 minutes, une charge de 300 kg était transportée parfois dans des conditions de visibilité des plus réduites.
A l’issue de cette campagne hivernale dans les Alpes, au printemps, cet hélicoptère a effectué une prospection minérale dans la haute vallée de la Vésubie dans les Alpes-Maritimes à la recherche de gisements d’uranium pour le compte de la Direction des Recherches Minières du Commissariat à l’Energie Atomique.
Au cours de l’été, le Fenwick-Bell G2 a été mis à la disposition des amateurs d’excursions aériennes à Evian en assurant pendant trois semaines une liaison aérienne avec Lausanne en Suisse. L’appareil décollait d’un podium de 4 x 4 mètres édifié dans le Jardin Anglais et allait se poser sur flotteurs sur la rive du port d’Ouchy. La durée de la traversée était de 4 minutes, formalités douanières incluses. Il était mis ainsi fin occasionnellement au monopole, datant de Napoléon III, concédé à la Suisse pour le transport de voyageurs à
travers le Lac Léman.
Dans le même temps, et dans un site voisin du Chablais, un second hélicoptère Fenwick-Bell de Hélicoptère-Service Briand permettait aux touriste d’aller admirer du haut des airs, près de Sixt, le site grandiose du Fer-à-Cheval, parsemé d’imposantes cascades dont l’ampleur l’a fait comparer au Cirque de Gavarnie.
Tout au long de l’été, c’est dans les massifs alpins que les hélicoptères de Jean-Pierre Briand devaient surtout donner la mesure de leur efficacité : à la demande de la Fédération de Pêche de l’Isère, alevinage en truites et ombles-chevaliers d’une centaine de lacs de haute-montagne ; transport des matériels et pose d’un ’pipe-line’ destiné à l’adduction d’eau dans les alpages insuffisamment irriguées pour les pacages du Perrier et de Chanteloup dans la région de Bourg d’Oisans ; descente du lait depuis les alpages vers les fruitières des vallée en déroulant des conduites souples.
Des accords ayant été passés entre l’entreprise Briand avec le Club Alpin Français et les municipalités intéressées, en juin, commença un important chantier dans le Massif de la Meije. Près de La Bérarde, au lieu-dit Les Etages (1.550 mètres) fut installé une plate-forme de départ pour la montée des charges au refuge du Soreiller, altitude 2.900 mètres. Charges des plus variées, allant des matériaux de construction à tous les éléments de l’aménagement intérieur du refuge. Au total, 20 tonnes transportées en un jour et demi, par une seule machine, le brave F-BDVL, qui le 30 juin, tourna pendant 15 h30, deux pilotes se relayant sur la base de six rotations par heure, chaque rotation n’exigeant que 9 à 10 minutes.
Du Massif de la Meije, Hélicoptère-Service Briand se rendit dans le Massif du Mont-Blanc où l’attendait de gros chantiers : la reconstruction en dur du refuge Albert Ier dominant le village de Montroc, près d’Argentières. Total des charges : 180 tonnes. Deux hélicoptères et trois pilotes ont mené à bien ce chantier en 60 jours qui ne furent d’ailleurs pas tous ’volables’, car lorsqu’il s’agit de franchir une ’dénivelée’ montagneuse de 1.500 mètres, il y a des problèmes. Il fallut utiliser deux machines transportant chacune la charge optimum de 225 kg et organiser une véritable ’noria’, l’une chargeant, l’autre déchargeant, chaque opération de chargement s’effectuant toutes les 240 secondes et que le rythme des rotations quotidiennes, de huit minutes chacune, était de 75 à 600 pour chaque machine.
La reconstruction du refuge des Grands Mulets (altitude de 3.051 mètres) nécessita la dextérité des pilotes, car l’héliport d’arrivée était constitué d’une plate-forme de 5 x 5 mètres située au sommet de l’Arête Wilson. En cinq jours de navettes, les 70 tonnes nécessaires à la confection de la semelle de béton du refuge y furent hissées sans incidents à la cadence de 200 kg toutes les 7 minutes.
Hélicoptère -Service Briand participa également au transport dans la haute vallée des Arves en Maurienne, dévastée au printemps par les inondations, de 33 tonnes de matériaux et et canalisations d’adduction d’eau amenées à pied d’œuvre en un jour et une matinée ; navettes entre le Mont Lachat et le glacier de Tête Rousse pour l’acheminement du matériel de forage, chargement de sable et poutres nécessaires à l’entretien du tunnel d’évacuation des eaux du glacier de Tré la Tête ; reconstruction du refuge de l’Aiguille du Goûter (altitude de 3.317 mètres) et de trois autres refuges dans l’Oisans ; transport du béton pour l’édification des
pylones du nouveau téléphérique, près de Chamonix. A cette occasion, mise en œuvre d’une nouvelle technique, celle du transport de béton brassé dans une benne spéciale qui déversera directement en vol stationnaire dans les coffrages qui eux-mêmes seront transportés par hélicoptère.
Dirigée par Jean-Pierre Briand assisté d’une équipe composée de trois pilotes, dont le chef-pilote Jacques Pétetin qui s’illustra lors du sauvetage de Vincendon et Henry au Mont Blanc et de Claude Aubé, deux mécaniciens, un assistant-mécanicien et deux chefs de charge, S. A Hélicoptère-Service Briand a connue une activité soutenue au cours de l’année 1957.
L’hélicoptère a fait évoluer le problème de la construction en haute-montagne, désormais, les difficultés de transport n’existent plus. Quand au prix de revient, et malgré la réputation de cherté du giraviation, il est sans concurrence, grâce à l’intensité des rotations que seul permet l’hélicoptère.

180 tonnes de matériaux destinés au refuge Albert 1er ont nécessité 666 rotations de 10 minutes avec 225 kg de charge pour un coût de 10.000 francs, soit une prix total 6.600.00 francs. Il aurait fallu 3.000 voyages de porteurs transportant une charge de 50 kg chacun pour un coût de 100 francs, soit un prix total de 15 millions. Il en résulte une économie de près de 60 %.

Adaptation du texte de Henry BEAUBOIS dans Les Ailes n° 1654 du 19 octobre 1957.
Adaptation du texte de Philippe GAUSSOT dans Aviation Magazine n° 237 d’octobre 1957

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