« Ça défouraillait de partout ! » : en 1992, ils ont tenté de s’évader de la centrale de Saint-Maur par hélicoptère
vendredi 25 avril 2025
Le 8 septembre 1992, Daniel Dieuleveut, pilote d’hélicoptère, est pris en otage à Blois. Il lui est ordonné de se rendre au-dessus de la centrale de Saint-Maur pour y faire évader un détenu.
Quand Daniel Dieuleveut et Jacky Désiré prennent place à bord de cet hélicoptère « Bell 206 » de la société Héli-Ouest vers 14 h, ce mardi 8 septembre 1992, à l’héli-station du Samu de Blois, ils envisagent de passer une journée des plus classiques. Il n’en sera rien. Quelques minutes plus tard, un dénommé H (...) Source
SANGLANTE TENTATIVE D’ÉVASION À LA M.C. DE SAINT-MAUR
La mort d’un rebelle pour sa liberté
Mardi 8 septembre, à 13 h 30, un homme se présente au bureau de la société Héli-Ouest, à Boissy-en-Eure,
près de Blois (Loir-et-Cher), afin d’y louer un hélicoptère pour réaliser des « photographies aériennes ». Il embarque dans l’ appareil, un Bell206 Long Ranger d’une capacité de 500 km et qui peut emporter sept personnes à son bord, en compagnie du pilote, Daniel Dieuleveut, et d’un second passager, Jacky Désiré, technicien du Service médical d’urgence et de réanimation (SMVR).
A peine l’appareil s’est-il élevé dans les airs, l’homme sort un revolver et oblige le pilote à se poser dans la campagne, près du manoir de Beauregard, dans la vallée du Cher, entre Saint-Romain et Hemery. Un deuxième homme monte alors dans l’engin, lesté de deux sacs. L’un contient des armes de poing
et des grenades, l’autre, un filin. L’hélicoptère s’élève de nouveau. En direction, cette fois, de la maison centrale de Saint-Maur (Indre).
Fusillade
Vers 15 h 30, l’appareil arrive en vue du terrain de football de 1’ établissement, où une vingtaine de détenus font du sport. Cette cour est protégée par un maillage de câbles anti-évasion aérienne tressés en carrés de cinquante centimètres de côté. Qu’importe, l’appareil se stabilise au-dessus du dispositif, les armes sont jetées dans la cour et le filin est dévidé. Un prisonnier, Christian Bethmont, s’y accroche et commence son ascension, tandis que deux autres détenus s’apprêtent à le suivre. L’un d’entre eux, Max Jardon, condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle pour vol à main armée puis tentative d’ évasion, inscrit au répertoire des « détenus particulièrement signalés » (DPs), s’empare d’une arme et ouvre un tir de couverture en direction du mirador le plus proche. Depuis un autre mirador, des coups de feu claquent. Pour la première fois en France, il vient d’être fait usage des armes contre un hélicoptère, au risque de faire exploser le réservoir de kérosène et de provoquer ainsi un véritable carnage. Des balles tirées par des mousquetons AMD 5.56 atteignent d’abord le prisonnier qui grimpait le long du filin. Mortellement touché de trois balles, il chute et s’écroule au sol.
Des tirs pour tuer
Plusieurs projectiles touchent également l’appareil aux hélices, au rotor et au moteur et blessent grièvement le pilote et l’un des deux hommes. Le pilote parvient cependant à poser l’engin en catastrophe entre les deux murs d’enceinte. Les tirs ne cessent pas autant le passager involontaire, qui tente de s’extraire de l’appareil, est à son tour atteint de plusieurs balles au thorax et aux cuisses.
Les gendarmes de la brigade de recherche de Châteauroux, qui ont déjà investi l’établissement, neutralisent alors les « pirates ». Le technicien du SMUR, gravement atteint, est évacué vers l’hôpital de Tours, tandis que le pilote et l’un de ceux qui l’ont enlevé sont orientés vers celui de Châteauroux. Une fouille en règle des cellules peut alors commencer pour tenter de retrouver les armes récupérées par les prisonniers.
Un rebelle
Dans cette tentative de recouvrer sa liberté, notre camarade Christian a donc trouvé la mort à trente-sept ans. Notamment condamné, en mai 1989, à quinze ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de Meurthe-et-Moselle après une évasion de la maison d’arrêt de Briey (Meurthe-et-Moselle), il était arrivé à la maison centrale de Saint-Maur le 29 mars 1991.
Rebelle de toujours, Christian était au nombre des prisonniers qui œuvrent activement à la construction des Comités de lutte et à l’organisation du mouvement carcéral. Son jeune frère Jean-Michel, âgé de vingt-huit ans, est l’un des deux organisateurs de la « belle » manquée. L’identité de son ami, qui a été blessé, n’a pas été communiquée. Ils ont tous deux été inculpés, jeudi 10 septembre, à Châteauroux, de « tentative de meurtre » ainsi que de séquestration de personnes, détournement d’aéronef et complicité de tentative d’évasion.
Le lendemain, les camarades de Christian feront un sit-in sur le terrain de sport, se regroupant autour d’une pancarte qui indique sobrement : « A notre camarade assassiné ».
Le 26 mars 1986, à La Santé, Michel Vaujour avait eu plus de chance.
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