En mémoire de Dragon 30...

vendredi 4 décembre 2009

En préparation...

"Suite à la catastrophe concernant le crash de l’hélicoptère EC 145 Dragon 30, qui vient se rajouter aux drames vécus par les victimes, leurs familles et les sinistrés, je vais poster une photo d’hélicoptère par jour jusqu’à la cérémonie d’hommage à nos collègues disparus.
J’essaierai, chaque fois, d’expliquer la photo, les circonstances et autres éléments...
"
Michel Persoglio

En mémoire des collègues disparus sur ce drame, mais aussi tous les autres personnels, membres des moyens aériens de secours. Et surtout que ces hommes ordinaires qui effectuent des choses extraordinaires qui impactent chaque jour la vie de nombreuses personnes.

La première photo, concerne une intervention dans le Var, il y a une paire d’années...
Une fin d’après-midi de réveillon de la Saint-Sylvestre. Vers les 15h00, un appel arrive au numéro d’urgence 18/112 pour signaler que lors d’une balade, une famille s’est retrouvée bloquée. En essayant de sortir de ce mauvais pas, le jeune garçon de la famille s’est retrouvé bloqué sur une falaise d’où il ne pouvait ni monter ni descendre.
De plus, la nature de la roche, très défavorable, augmentait encore grandement les risques de chute. L’enfant étant à plus de 30 m de la mer et à plus de 30 m du sommet.
D’abord sécurisé par un membre du GRIMP Sud, l’enfant et le sauveteur sont restés immobiles en attendant l’arrivée de la machine en provenance de la base de Marseille.
L’extraction, très compliquée, s’est faite au travers des branches d’un pin parasol. Quand le sauveteur à lâché la longe de sécurisation il ne savait pas si la manœuvre allait se solder par une réussite ! Grâce à la maîtrise de l’équipage (Pilote, mais également Mécanicien Opérateur de Bord, en charge du treuillage) et à la maîtrise et le professionnalisme du secouriste du GRIMP, tout s’est bien terminé, comme dans la très grande majorité des cas...

Mais si le professionnalisme de ces hommes n’était pas au top niveau, peut être que le réveillon de cette famille aurait été beaucoup moins joyeux... Peut-être qu’eux ne s’en sont pas rendus compte... Mais les professionnels du secours que nous sommes ont eu des sueurs froides.

Sur cette photo, la machine vient de se présenter et de manière à alléger l’hélicoptère et à faire prendre des risques aux minimum de personnes, l’hélico fait un stationnaire tenu à 30 cm de la rambarde pour que on puisse faire débarquer l’équipage médical ainsi que son matériel ; pendant tout ce temps, le pilote tient la machine immobile.


Ce soir, deux photos qui proviennent de la même série.
Il s’agit d’un exercice qui vise à "qualifier" les personnels du Service de Santé et de Soins Médicaux des Sapeurs Pompiers (du Var en l’occurrence, mais c’est pareil dans tous les départements).
En effet, tous les personnels intervenant avec les moyens de secours aériens doivent être "qualifiés" treuillage jour ET nuit.
Les interventions sur inondation que nous avons vécues se sont déroulées, pour un grand nombre de nuit.
Les photos d’aujourd’hui sont la partie "Jour"... En fait, en fin d’après-midi du 25 juin de cette année.
Le casque vert indique que le personnel est membre du SSSM, du SDIS 83 en l’occurrence un médecin. Mais il y a aussi des infirmiers, puisque c’est la composition de l’équipe médicale projetée au plus près de la victime pour la prendre en charge le plus tôt possible.
Mais dans cette phase-là, le treuillage, toutes ses années d’études ne servent à rien... Le chef, c’est le Mécanicien Opérateur de Bord qui est le Boss... Celui qui tient la commande du treuil de 90 mètres de course, capable de lever 250 kg.
D’ailleurs dans la phase de treuillage, c’est lui qui donne les informations au pilote pour qu’il puisse se positionner et rester stable : le stationnaire ..
En effet, le pilote doit conserver son regard sur un point fixe de manière à "tenir le stationnaire", pour ne pas dériver.
C’est le MOB qui va le guider en lui donnant des indications sur les déplacements qu’il doit faire... 1 m à gauche, 1 m avant. sauveteur accroché, j’enroule, en charge...
Sans cesse, les deux hommes, l’un aux manches (il y en a deux sur un hélicoptère, sans oublier les pieds...) Autant vous dire qu’il faut maîtriser les gestes non coordonnées (vous savez quand on se tape sur la tète et qu’avec l’autre main on se frotte le ventre...). la main gauche agit sur le "collectif", ce qui fait monter et descendre l’hélico. Mais une action sur cette commande, impose de jouer avec les pieds pour ne pas que la machine ne se mette à tourner sur elle-même... Et la main droite agit sur le manche "cyclique" qui va faire avancer et reculer l’hélico, (plus la droite et la gauche)... Et l’autre au treuil, au guidage et à la surveillance, debout sur un patin, à l’extérieur de la machine... Même sous la pluie !
Pas simple... voilà pourquoi on demande aux pompiers de ne pas parler à la radio à un hélico en cours de treuillage sauf en cas d’urgence de sécurité pour la machine...
Mais c’est vrai que quand on est en bas et qu’on regarde, on croit qu’il est fixe ... Certains pensent même qu’il y a un système automatique... que nenni !
Cette impression de facilité... C’est juste le professionnalisme de l’ensemble de l’équipage !
Et là... On est le jour... On verra demain la nuit...

P.S. : sur cet exercice, le MOB c’est Mitch... Un des collègues disparus dans le drame... On pense fort à lui... On pense fort à eux !

Photo 1

Le MOB vient de passer le médecin au-dessus du vide, grâce au pivotement du treuil. D’un regard il s’assure que le sauveteur est prêt, il vérifie encore une fois que le mousqueton est bien serré.
Le sauveteur est dans le vide, attaché au croc par son baudrier.
Le MOB commande le treuil qu’il va dérouler à grande vitesse... Il le ralentira juste avant qu’il ne touche le sol.

Photo 2
Et voilà ! C’est parti... Mieux que les parcs d’attraction !
Seulement là... C’est ma vraie vie ..
La sécurité de tous est presque uniquement assurée par le professionnalisme de l’équipage... Il doit anticiper les mouvements de la machine, les coups de vent, les trous d’air et tous les autres impondérables...
Et en cas de soucis, il y a le risque d’écraser le sauveteur avec la machine... Le MOB doit-il sectionner le câble pour donner un minimum de chances de survie au sauveteur sur le croc ? Doit-on le garder pour ne pas le largeur dans le vide ? Depuis combien de temps est-ce que je déroule le câble ? Est-il encore haut ?
Et tout ça en quelques dixièmes de seconde...




Pour ce soir, ça sera les opérations de nuit
Le MOB se prépare à accrocher le croc du treuil avant d'envoyer le membre du SSSM (Service de Santé et de Secours Médical) dans le vide - Photo Michel PersoglioComme je vous l’ai dit hier, si les hélicoptères sont aussi performants dans les opérations de secours, c’est justement grâce à leur capacités de stationnaire, opération qui permet les treuillages.

Je vous ai expliqué les actions à réaliser pour effectuer cette opération. Mais prendre des points de repère, estimer une distance, une hauteur en pleine nuit, cela est encore plus compliqué, surtout si on rajoute les obstacles (lignes électriques, pylônes, arbres, etc.).
Les équipages utilisent des Jumelles de Vision Nocturnes (JVN) qui permettent d’amplifier les lumières existantes (même la lune). Le soucis quand, comme dans cet exercice, on est à proximité immédiate d’une ville (dans ce cas, c’est Toulon qu’on voit au fond), les jumelles sont peu utilisables car la luminosité est importante...

C’est à dire que ces difficultés à se repérer et à estimer les distances, à analyser une situation de nuit...

Déjà, il faut trouver la victime qui s’est signalée au numéro d’urgence, de secours et de sauvetage 18 ou 112 qui n’a pas vécu depuis la cabine d’un hélicoptère de sauvetage la concentration, la tension même qui règne pour trouver cette victime en danger de mort, peut être déjà emportée par le courant...
Les gens qui habitent dans le secteur ont parfois du mal à se repérer dans leur quartier, alors imaginez un équipage de sauvetage qui arrive d’un autre département...
Mais malgré tout, ils y arrivent ! Encore une fois, ça peut paraître "normal" à certain. Je peux vous affirmer que c’est tout sauf "facile" !

Sur le dernier week-end dramatique que le Var a eu à subir, plus de 80 % des treuillages de victimes ont été effectués de nuit, soit plus de 250 personnes sauvées dans ces conditions !

A suivre...

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