De Pau à Kaboul, le Tigre fait l’unanimité

lundi 21 février 2011

Comandant en second, le colonel Patrick Carbonnel évoque l’actualité du régiment palois, très présent en Afghanistan.

Le colonel Patrick Carbonnel assure le commandement du 5e Régiment d'hélicoptères de combat « par suppléance » : chef de corps en titre, le colonel Nicolas est actuellement en Afghanistan, où il commande le bataillon d'hélicoptères français - Photo Luke LAISSACDeux militaires de votre régiment ont été blessés au début du mois en Afghanistan, à la suite d’un atterrissage brutal. Comment vont-ils ?
Patrick Carbonnel. Ils ont été pris en charge à l’hôpital de Kaboul, qui est parfaitement équipé, et vont bien. Ils sont d’ailleurs encore à ce jour en Afghanistan. Depuis notre arrivée, c’est le premier pépin humain que nous enregistrons.

Vous êtes en Afghanistan depuis maintenant dix-huit mois. Quels sont vos effectifs sur place ?
Le bataillon d’hélicoptère présent sur place comprend 140 personnes, dont une centaine de militaires appartiennent au 5e RHC. Une forte présence qui est notamment liée au Tigre : sur les 13 exemplaires dont nous sommes aujourd’hui équipés à Pau, trois sont basés en permanence à Kaboul. Et si un deuxième régiment français sera à son tour équipé en 2013, nous restons à ce stade les seuls au sein de l’aviation légère de l’armée de terre (Alat) à disposer de tels appareils. C’est vrai également pour les hélicoptères Cougar. Nos pilotes et nos mécaniciens - un vivier d’une quinzaine d’équipages - sont donc en « auto-relève » permanente sur place. Ils se relaient sur des missions de trois mois, avec un rythme de rotation très élevé : certains entament déjà leur troisième mission.

L’Afghanistan reste une zone très sensible (1). Comment prépare-t-on ce type de mission depuis Pau ?
La spécificité de notre régiment, c’est d’être tourné en permanence vers l’opérationnel. Avec l’Alat, nous constituons une arme d’emploi, de contact. On ne se prépare donc pas « au cas où ». En l’espèce, quels que soient son rang et sa fonction au sein du régiment, chaque militaire qui doit partir en Afghanistan est désigné six mois avant son départ. Cette période permet d’accentuer sa formation sur son cœur de métier et de réaliser des exercices inter-armes. Tous les soldats reçoivent également une formation de secourisme de combat et apprennent le tir à l’arme individuelle. Un organisme parisien vient aussi proposer des exposés sur l’histoire, la géographie ou la culture du pays.

Face au risque encouru, l’armée prend-elle en compte l’inquiétude des familles installées en Béarn ?
Le risque est certes supérieur par rapport à d’autres théâtres, nos équipes sont exposées, mais les gens sont préparés et n’ont pas d’appréhension particulière. J’ajoute que nous sommes basés sur l’aéroport de Kaboul, où nous bénéficions d’infrastructures exceptionnelles dans un environnement sécurisé.

Les familles sont pour autant prises en compte : nous mettons à leur disposition une cellule d’aide, constituée de trois cadres, qui sont à leur écoute et appellent régulièrement pour prendre de leurs nouvelles. De leur côté, les équipages sont systématiquement débriefés à leur retour de mission et bénéficient s’ils le souhaitent d’un accompagnement.

Le Tigre a-t-il passé avec succès cette première épreuve du front ?
J’avoue que l’on se méfiait un peu au début de sa fragilité, compte tenu du niveau de technologie embarquée. Or, à Kaboul, ils dorment toutes les nuits dehors ! On est très, très satisfaits de l’aéronef comme de l’armement embarqué et de ses performances de jour comme de nuit. Hormis l’incident du début du mois [l’hélicoptère est toujours en Afghanistan dans le cadre de la procédure d’enquête, NDLR], il n’y a eu aucune casse notable sur ces nouveaux appareils depuis dix-huit mois. Ils reviennent simplement à Pau toutes les 400 heures de vol pour une révision en profondeur dans nos ateliers.

Les simulateurs de vol Tigre sont-ils aujourd’hui installés dans vos locaux ?
Ils le sont effectivement depuis un an et nous sommes actuellement en pleine montée en puissance. Il s’agit précisément d’un simulateur tactique pour tout type de pilotage et de deux cockpits Tigre. Procédures de pannes, entraînement tactique, vol aux instruments : c’est un complément très utile au pilotage en conditions réelles.

L’objectif, c’est que chaque pilote puisse faire chaque année quarante heures de simulateur. Pour mémoire, la formation initiale sur Tigre, d’une durée de trois mois, s’effectue au sein de l’école franco-allemande sur la base Alat du Luc, en Provence. Cinq pilotes de Pau y sont actuellement en formation.

Le 5e RHC dispose aujourd’hui de 13 Tigre. Combien y en aura-t-il finalement à terme ?
Nous en recevrons sept dans les deux prochaines années. Au total, 20 Tigre équiperont donc le régiment.

L’installation, il y a un an, des bases de défense a suscité remous et inquiétudes. Au sein du 5e RHC, cette nouvelle organisation est-elle aujourd’hui « digérée » ?
Il y a eu un peu de méfiance au départ mais, pour la quasi-totalité des personnels du régiment, il n’y a pas eu de changement au quotidien.

Aujourd’hui, les dimensions administratives, financières, comme les services qui relèvent du soutien de l’homme (habillement, restauration, infrastructures…) sont centralisées au sein de la base de défense de Pau, laquelle est référente pour les régiments de la garnison situés à Pau, Tarbes, Bayonne et Dax.

Le fait d’être déchargés de ces activités nous a permis de nous concentrer sur notre cœur de métier : pour une commande de fourniture de bureau, je suis désormais simple client. Et ça me va très bien !

Les débats sur la privatisation d’activités au sein de l’armée passent aussi par le Béarn. Le 5e RHC a-t-il de tels projets d’externalisation ?
Notre vocation, c’est d’être engagé et on l’est en permanence : dans notre cas, l’externalisation est assez difficilement compatible. Nous n’avons aucun projet dans ce sens.

(1) 53 soldats français ont perdu la vie en Afghanistan depuis le début de l’engagement des forces françaises dans ce conflit. Christophe Galichon source

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