La nuit d’enfer des sauveteurs de l’Amoco-Cadiz

dimanche 11 mars 2018

16 mars 1978 : Naufrage du pétrolier Amoco-Cadiz
Il y a quarante ans, bravant la tempête, René Martin et son équipage d’hélicoptère ont sauvé 33 hommes et femmes de l’Amoco-Cadiz. Récit d’une nuit d’enfer.
 L'équipage du Super Frelon N°44 avec de gauche à droite : Guy Crassin (mécanicien), Michel Le Gall (treuilliste), Jo Le Nabat (plongeur), René Martin (pilote), Yves Dagorn (copilote) - Photo Marine Nationale.« Rapplique à la base, on a besoin de toi. Ce n’est pas une blague !  » Il est 23 h 20, ce 16 mars 1978, dans le salon d’un pavillon de Lanvéoc. Le lieutenant de vaisseau René Martin, 39 ans, pilote de Super Frelon, raccroche le téléphone. Sa femme s’est levée aussi. Dans la cuisine, il l’entend qui fait du café.

Un quart d’heure plus tard, il est au PC de la base. Le capitaine de vaisseau Vivanco l’attend, très calme, comme toujours. « Un pétrolier s’est échoué du côté de Portsall. Allez voir. Et faites pour le mieux… »

Ils sont cinq à bord du Super Frelon, fonçant dans la nuit. La température extérieure est tombée à 0 degré, le règlement impose d’annuler le vol à cause du gel. Mais, cette nuit-là, René Martin ne tiendra pas compte des règlements.

Passé les lumières de Portsall, l’hélicoptère s’enfonce dans la nuit comme on plonge dans un gouffre. Comment retrouver un navire sans feux dans une telle purée ? Soudain, un puissant rayon lumineux transperce la nuit : c’est le projecteur du remorqueur Pacific qui indique la direction du pétrolier. L’hélico suit le rayon.

« Ils imploraient à genoux  »
Le Super Frelon en stationnaire au-dessus du pétrolier Amoco-Cadiz coupé en deux - Photo Marine NationaleEt voilà qu’une masse sombre, énorme, se dresse dans l’ombre. Le château du pétrolier. La mer tourbillonne autour de la coque, les vagues balayent le pont. Massés sur un aileron du château, au milieu d’un océan de pétrole, giflés par les embruns, des hommes agitent les bras. Certains implorent à genoux.

Quarante-trois minutes durant, les yeux rivés sur les lettres géantes « Amoco » qui lui servent de repère, René Martin va rester cramponné à ses commandes, luttant contre les rafales de vent. Derrière lui, le treuilliste Michel Le Gall remonte un à un les naufragés. Le troisième est une femme.

Sur le navire, le plongeur Jo Le Nabat est parvenu à calmer les esprits. Quand il a pris pied sur l’aileron du pétrolier, tous se sont précipités sur la sangle de treuillage. Il a fait asseoir tout le monde. Il faut deux minutes pour remonter une personne. Le temps passe, Le Super Frelon en cours d'hélitreuillage au-dessus du pétrolier Amoco-Cadiz - Photo Marine Nationale le pilote n’en peut plus de tenir sa position. Ses membres lui font mal, ses yeux brûlent, il a l’impression d’étouffer.

Vingt-huit des quarante-quatre marins de l’Amoco seront sauvés par ce premier hélitreuillage. Un second Super Frelon prend le relais. René Martin dépose sa cargaison humaine à Lanvéoc. Puis revient, récupérant encore cinq passagers et le plongeur Le Nabat qui n’a pas quitté l’Amoco de tout le sauvetage.

Il est plus de 3 h du matin lorsque René Martin est de retour chez lui. Il vient de vivre l’un des plus importants sauvetages par hélicoptère jamais réalisés, il est resté 43 minutes en stationnaire, un record. Et, tandis qu’il s’endort enfin, là-bas, à Portsall, au milieu des vagues et des craquements de tôle, l’Amoco s’enfonce dans une mer de pétrole. Source sud-ouest.fr

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