Histoire des hélicoptères dans les Alpes du Nord depuis 1950

dimanche 6 janvier 2008

Le 17 novembre dernier, les Saléviens de Paris se réunissaient pour entendre une conférence de Jean-Pierre Lombard avec projection de photos. Etant donnée la place dont nous disposons, nous ne pouvons vous donner qu’un résumé de cette conférence.

L’histoire des hélicoptères est plus longue que celle des avions : commencée par un dessin de Léonard de Vinci au XV e siècle, elle est reconnue officiellement en 1907 avec les expériences réussies de vol avec pilotes par trois pionniers français : Léger, Breguet et Cornu.

I - Quelques éléments historiques
Le développement de l’hélicoptère a été plus long que celui de l’avion : une quarantaine d’années, alors que l’avion était au point dès la Première Guerre mondiale. Ce décalage peut être expliqué par la complexité technique plus grande des appareils à voilure tournante.
La Seconde Guerre mondiale va constituer un accélérateur des recherches.

Il faut attendre la période 1944-1950 pour voir apparaître les premières productions industrielles américaines, notamment :

• le Bell 47 - moteur à pistons - 200 CV - utilisations civile et militaire,
• le Sikorsky S-51 - moteur à pistons - 450CV - utilisation civile.

Dans les autres pays, les années 1950 voient le développement des hélicoptères commercialisables. En ce qui concerne la France, le premier hélicoptère, réalisé par la SNCASE, est le SE 3110. Cinq ans plus tard, sortira une nouvelle génération d’hélicoptères, l’Alouette II en 1955 et l’Alouette III en 1962.

Dans ce tableau rapidement dressé, on peut s’interroger sur la place de l’hélicoptère en montagne, par rapport à l’avion. De 1920 à 1939, le pionnier français Joseph Thoret développe la théorie et l’enseignement du vol en montagne.

Après guerre, le Suisse Hermann Geiger invente la technique d’atterrissage sur glacier et réalise des missions diversifiées : sauvetage, transport, formation... Il est à noter que de 1961 à 1980, d’autres pionniers tels qu’Henri Giraud ou Michel Ziegler poursuivront des activités aériennes en Dauphiné et Savoie, en utilisant exclusivement l’avion. Au fur et à mesure des progrès techniques réalisés dans la conception de l’hélicoptère, ce mode de transport va concurrencer l’avion dès 1955.

Voyons comment a évolué l’usage de l’hélicoptère en montagne et en sauvetage.

a - L’hélicoptère en sauvetage et évacuation sanitaire (en usage militaire)
La première utilisation militaire de l’hélicoptère par l’armée américaine a été le sauvetage en 1944. En ce qui concerne la France, le premier banc d’essai du sauvetage par hélicoptère se fait dès 1950, en Indochine ; des hélicoptères Hiller remplacent les avions Morane pour secourir des combattants blessés (à noter la présence parmi les pilotes de la future Général Valérie André).

b - L’épisode suisse de H. Geiger
Hermann Geiger est le plus prestigieux des pionniers de l’aviation de montagne. Il doit en fait sa notoriété surtout à l’avion qu’il a utilisé dans ses premières années d’activités aériennes (années 50), avant d’utiliser conjointement l’hélicoptère. On peut mesurer l’évolution de sa Société Air Glacier, créée en 1965, un an avant la mort accidentelle de Geiger, au travers de sa flotte. Dans les années 1952-1955, l’entreprise possède un avion Piper Super Cub de 150 CV, un hélicoptère Bell 47 de 210 CV. Vers 1965, d’autres appareils viennent rejoindre ce parc, notamment une Alouette III. A travers l’évolution des moyens utilisés par ce pionnier de l’aviation en montagne, on voit celle des progrès réalisés sur les appareils, depuis un hélicoptère à puissance limitée (Bell 210 CV) jusqu’aux hélicoptères à turbine (Alouette II et Alouette III), plus puissants.

II - Les prémisses du secours en montagne
Un drame de la montagne allait accélérer en France l’organisation du secours en montagne et l’usage de l’hélicoptère. Il s’agit de l’épisode douloureux de la tentative de sauvetage au sommet du Mont Blanc de jeunes alpinistes, Vincendon et Henry, à Noël 1956. C’est à la fois un échec et une réussite pour l’hélicoptère.
Échec, car le choix par l’Armée de l’Air d’un Sikorsky tourne à la catastrophe. La réussite, c’est le recours tardif à la toute nouvelle Alouette II qui permettra d’évacuer les sauveteurs naufragés, mais pas les deux premières victimes. Ce drame, qui se produit à un moment où la pratique des sports alpins se développe, va déclencher une prise de conscience politique débouchant dès 1958 sur la première organisation du secours en montagne en France. Les opérateurs sont essentiellement la Gendarmerie Nationale et la Sécurité civile, parfois assistés par des moyens privés. Ainsi le secours en montagne est une des activités de SAF Hélicoptères en Savoie, depuis le début des années 80, en complément d’autres activités (travail aérien et transport de fret) ; il s’y ajoute le transport de passagers. D’autres sociétés privées, telle CMBH (Chamonix Mont Blanc Hélicoptères) œuvrent localement, essentiellement sur d’autres besoins que le sauvetage en montagne. La gendarmerie et la Sécurité civile ont utilisé des Alouettes II et III. L’hélicoptère a supplanté très tôt l’avion de montagne, au début des années 1960 dans la mission la plus sensible, celle du secours en montagne.

III - En guise de conclusion
Pour conclure cette histoire résumée des hélicoptères en montagne, il est nécessaire de mentionner quelques femmes et hommes de France qui ont le plus contribué à leur utilisation : le médecin-capitaine et pilote Valérie André, futur général de Brigade, pionnière des évacuations sanitaires en Indochine, Jean Moine, pilote et théoricien reconnu dès 1953, Jean Boulet, pilote d’essai, Roland Fraissinet, pilote d’avion et d’hélicoptère, promoteur du secours en montagne privé en Savoie. Sans oublier tous les autres navigants (pilotes, mécaniciens treuillistes) et tous ceux qui concourent au sol à la réussite de la chaîne de sauvetage secouristes, médecins…). Car si l’hélicoptère est un outil important du sauvetage, il s’inscrit dans une chaîne plus large de compétence et de dévouement.

Jean-Pierre Lombard
Logisticien, historien des transports
source : Extrait de la SALEVIENNE n° 59 - Janvier 2008

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