Jean-Marie Potelle alias Papycoptère

Publication : 20/06/2008 Auteur(s) : Papycoptere

Je suis né le 12 août 1943 à Montpellier. Mon père qui était gendarme fut muté en Allemagne et nous y sommes restés cinq ans. Revenu en France, il fit l’École d’Officier à Melun. Jean-Marie Potelle accoudé à une Alouette II - Photo DR collection JMP Après sa réussite, mes ennuis commencèrent au niveau des études. Muté tous les quatre ans, je fis du classique, du moderne et enfin technique où j’ai pu obtenir mes brevets Techniques de menuiserie et de mécanique. Encore une fois mutés, nous nous retrouvons à Satory, mon père ayant passé son brevet de Pilote d’Hélicoptères en 1957. Me demandant ce que souhaitais faire, je lui répondis que je voulais travailler, l’armée n’étant plus qu’à deux ans. En 1957, j’eus la chance de passer mon baptême de l’air sur hélicoptère chez Fenwick Aviation basée à Issy-les-Moulineaux avec le célèbre Jean Moine ; cette société formait les pilotes et mécaniciens de différentes armes sur Bell 47. Mis à part cela, étant bon en physique, chimie et mathématiques je me présente aux établissements W. qui m’embauchent pour diriger le laboratoire d’essais et de démonstrations.
Un jour, mon patron passe me voir et s’aperçoit que j’ai mis des posters d’avions pour décorer. Il me demanda alors si j’aimais ce genre d’aéronefs et me proposa de me payer mon brevet de pilote. En fait, il était Président de l’aéro-club Tissandier et possédait ses propres avions. Un Piper J3, un Emeraude et un Mousquetaire. J’ai donc passé mon brevet en neuf mois et après je l’emmenai en Mousquetaire voir nos clients car il n’aimait pas piloter. Cela m’a permis également d’obtenir le Certificat des Arts et Métiers de traitement des métaux.

À côté des gendarmes à Satory se trouvait l’ALAT et je me décidai d’aller voir comment devenir pilote chez eux. On me fit passer plusieurs examens dont celui des tests psychotechniques que je réussis et me donnant droit à des heures de vol pour obtenir mon certificat prémilitaire de Pilote ALAT. De temps en temps, je volai avec les gendarmes et je fus même lâché sur Bell en stationnaire à Chavenay par un moniteur gendarme dont je tairai le nom. Nouvelle mutation, mon père est affecté à Lyon ; le Mont Blanc n’est pas loin.

Le 1er janvier 1963, je suis incorporé à Nancy pendant trois mois pour les classes puis c’est le départ pour l’Ecole de Dax. Nous sommes quatre-vingt neuf candidats ; le matin : théorie, l’après-midi : les vols sur avion Piper L-18, puis L-19, L-21 et enfin Nord 3202 pour la voltige avec Patrick PENA.
Nous sortons vingt et un brevetés et l’on demande alors quels sont ceux qui veulent passer sur hélicos. Trois candidatures peuvent être acceptées, je postule immédiatement et suis accepté. Je vole sur Bell 47 et un peu sur H-21 « Banane Volante ». Retour en unité, je rejoins tout d’abord Grenoble puis, à la demande de mon père, je suis affecté à Buc au 1er GHL. J’effectue de nombreux convoyages ce qui me permet de gonfler mon carnet de vol.

Fin 1964, mon père me recommande de retourner dans le civil ; mon employeur attend mon retour. J’obéis et me retrouve civil avec les avions de mon patron. J’aime bien, mais l’hélicoptère me manque. Un jour, Monsieur W. me demande d’aller visiter trois clients, l’un au Mans, l’autre à Vire et le dernier à Caen. Quand il voit ma mine sceptique, il me demande pourquoi et je lui réponds que les aérodromes sont rarement à côté des entreprises, donc voitures obligatoires. Devant sa mine défaite, je lui demande s’il me laisse un peu de crédit et je vais arranger l’affaire. Je file chez Fenwick et rencontre Jean Moine, lui explique mon problème. Il me demande sur quelles machines je suis qualifié et lui annonce Bell 47, Djinn, Alouette 2 et Alouette 3. Il m’emmène devant un Bell Jet Ranger, me demande de m’asseoir et m’explique la mise en route. Après deux heures de travail avec l’appareil, Jean me demande de revenir le lendemain et nous recommencerons les séances. À la fin de celles-ci, il me donne ma qualification. Tout heureux, je lui demande si je peux louer la machine pour la journée. : No problem. Je retourne voir mon patron pour lui dire que je viendrai le chercher dans sa propriété pour faire notre mission. Il n’a pas cherché à comprendre. Le jour J, la météo est clémente, les usines prévenues de notre arrivée et le moyen de transport utilisé. Je vais chercher Monsieur W. tout surpris de mon aéronef et nous effectuons notre mission en ayant eu à faire quelques baptêmes. Bref, une très belle journée qui en verra bien d’autres par la suite car mon patron est accro à l’hélico.
Pendant quelque seize ans, je vais survoler la France. Entre-temps, j’effectue deux stages montagnes pour me perfectionner, l’un avec la Gendarmerie nationale à Briançon et l’autre avec la Protection civile à Pau. Je suis un véritable accro au vol montagne et j’y retournerai souvent. J’effectuerai des stages montagne en 1980, 1982, 1984 depuis Annecy puis ce sera du côté du Briançonnais et les Pyrénées.

Je commence à être un peu connu dans mes activités aéronautiques et ça me servira plus tard. En 1967, la vie va changer car je me marie avec Michèle, femme agréable qui me laissera faire mon métier émaillé de beaucoup de déplacements... Deux ans plus tard, nous aurons l’arrivée de Christine, fille adorable, mais que je ne verrai pas grandir beaucoup, hélas. Nous habitons la Haute-Savoie, Thonon-les-Bains exactement avec ma femme avant de regagner Paris où naîtra notre fille et je vais souvent vers le Mont Blanc avec un appareil d’une toute nouvelle société qui s’implante. Mon établissement change d’orientation et passe à l’émaillage donc finit l’électrochimie pour moi et l’hélico aussi. J’en discute avec mon ami Wielfried Messens, responsable des Missions Spéciales Hélicoptères d’Aérospatiale, qui m’obtient deux contrats, l’un pour la mise au point de barrages flottants pour lutter contre les nappes de pétrole et transportable par hélicoptères et l’autre pour la mise au point de lance canon pour lutter contre les feux en tout genre forêts ou aéroportuaires. Cela me valu de beaux déplacements aux essais en vol à Marignane où j’ai pu voler avec Jean Boulet, Roland Coffignot, Claude Aubé, Gérard Henry, Max Jot et bien d’autres. J’ai beaucoup appris à leur contact et ai pu passer un certain nombre de qualifications. J’ai également participé au Salon du Bourget dans des scénarios dont seul l’ami Wielfried avait le secret. La Tour Infernale avec démonstration de la lance canon, l’Amococadiz où là ce fut les barrages qui furent mis en évidence. J’ai participé à plusieurs Infopol également.
Mais tout à une fin, les missions spéciales vont disparaître et Jean-Marie avec. Je deviens vice-président de l’AIRDA (Association Internationale de Recherche et Développement Aéronautique) et vais m’occuper des essais du Rotorway EXEC 90, le premier en Europe.
Je me décide à écrire pour les Revues Aéronautiques telles Aviasport, Aviation et Pilote, Aéro 2000, Héli-Flash, Hélico Revue sur mon sujet préféré : l’Hélico.
Wielfried qui ne m’a pas laissé tomber me présente au responsable d’une société de travail agricole par hélicoptères. Celui-ci m’embauche pour la mise au point de systèmes de largage par hélicoptères de produits dispersants sur nappes de pétrole. Le contrat touche la Marine Nationale. Entre-temps, je vais sur les chantiers agricoles avec Alouette 2, Lama et Djinn. J’aurai l’occasion d’aller à Saint-Mandrier pour essayer notre système sur Super Frelon. Là aussi, après commande de huit unités, mon contrat prend fin.
J’ai le plaisir, en rôdant vers Issy-les-Moulineaux, de rencontrer mon ami Michel Anglade qui m’invite avec Joël Bastien, patron d’Hélifrance, à aller voir une curiosité à Toussus-le-Noble. Effectivement, dans un hangar, est en finition la peinture d’un Dauphin en bleu, blanc, rouge. Joël m’explique qu’il démarre une desserte des aéroports Roissy, Orly, Héliport de Paris. Michel qui connaît ma situation propose à Joël de me prendre dans l’équipe. Je passe ma qualification sur Dauphin grâce à Michel et me voilà parti.

Pendant ma période creuse qui n’a pas duré longtemps, j’ai passé ma qualification d’instructeur avec Jean-Claude Pruniaux, un sacré bonhomme. Cela va ma servir car je donne des cours chez Air Continent et Maurice Ripoche à Saint-Cyr. Deux ans et demi après l’ouverture de la ligne, celle-ci est abandonnée faute de rentabilité ; seuls seront conservés les Instructeurs et j’en fais partie, une chance. Nous démarrons l’école avec Henri Alquier et avons bon nombre de clients. À l’héliport où je suis tous les jours, je fais connaissance d’artistes de tout genre. Nos clients écoles sont plutôt des industriels ou des jeunes ayant fait un emprunt qui malheureusement arriveront au bout mais ne pourront persévérer faute de moyens pour maintenir leur licence. Les appareils utilisés : le Hughes 300, l’Enström, le Bell 47, l’Alouette II, le Jet Ranger et l’Écureuil. À cette époque, je fais la connaissance de Philippe de Dieuleveult qui anime "La Chasse aux Trésors" avec qui je deviendrai ami. Nous volerons souvent ensemble.
Au bout de deux ans, Joël Bastien prend la décision de redémarrer une ligne Evry - Roissy et me propose d’en prendre la Direction. Ce projet ne me plaît pas du tout et je commence à chercher ailleurs. J’ai fait connaissance de Christian P. un des patrons de La Défense. Je lui expose mon problème et spontanément il me propose de rentrer à son service. Les missions sont variées. Indépendamment, mes élèves me demandent de les prendre en mains pour continuer leur progression. Je passe un accord avec Hélidan basé à Toussus et qui dispose de Bell 47, Alouette 2 et Robinson R 22. Je passe mes samedis et mes dimanches au terrain ce qui me permet de faire voler ma femme et ma fille.
Mais tout cela ne dure qu’un temps. Christian P. a des ennuis qui lui tombent dessus et là fini l’hélico et l’avion. Je me retrouve au bout de cinq ans sans emploi. Un jour, me promenant du côté d’Issy-les-Moulineaux, je retrouve un vieil ami Jean-Jacques Azoulay qui tient un restaurant non loin et qui m’invite à déjeuner. Je vois rentrer dans son établissement Luc Chatel et Gérard Klein que je connais bien. Jean-Jacques me dit qu’ils travaillent pour La Cinquième qui est à côté de son estaminet. Le lendemain, il me téléphone me demandant de revenir chez lui pour me présenter à un responsable de La Cinquième. Je rencontre Thierry Kayat qui me propose de rentrer dans sa société de production pour une nouvelle émission "l’Esprit du Sport". Mon rôle : aller chercher les invités en voiture dans Paris et en hélicos pour les autres. Je rencontrerai des gens fabuleux : le Professeur Cabrol, le Baron Empain, Haroun Tazieff, Tabarly, Mimoun, Kopa, Piantoni, Fontaine que j’ai toujours admirés, Alain Delon, Jack La Motta, Jean d’Ormesson.
Nous avons réalisé soixante émissions. Mais au bout de deux ans je sentais que la machine ne fonctionnait plus comme au départ. Je continuai toujours l’école et c’est ce qui va me sauver. Je donne ma démission de la société de production qui arrêtera l’émission faute d’audience. Je me consacre à l’école et j’ai pas mal de clients. J’organise avec mon ami Pierre Poupardin un rassemblement aéronautique dans l’île Marrante à Colombes à la demande de la Mairie. Grâce à mes relations, nous avons pu avoir sept hélicoptères gratuitement que ce soit d’Hélicap, de la Gendarmerie, d’Hélifrance et d’une Société Nouvelle et en plus en statique le Kompress et le Djinn d’Hélidan. Le clou de cette manifestation fut le treuillage de deux plongeurs dans la seine par Alouette 3 de la base de Paris.

J’approche des soixante ans et je sais qu’à cet âge-là on ne peut plus faire de Transport public mais du travail aérien, oui. Mais pourquoi embaucher un ancien alors qu’il y a tant de jeunes au chômage ? Je décide donc d’arrêter partiellement l’hélico jusqu’en 2005. Je finirai mes deux ans avant la retraite comme gardien de parking. Bien sûr, je continue à écrire et donne un coup de main au Musée de l’Air en allant une fois par mois présenter l’Alouette II N°01.
A Albi où je vis, j’ai fait connaissance des gens de l’Aérodrome qui m’ont accepté mais il n’y a pas d’hélicos. Jean-Marie Potelle aux commandes d'un Agusta A.109 - Photo DR collection JMP Je fais des exposés dans les écoles sur mon sujet préféré ce qui intéresse beaucoup les jeunes et les associations me demandent aussi. Bref, Papycoptère, surnom que m’ont donné Manon et Yoann mes petits-enfants que j’aime beaucoup, est connu à Albi. Ma carrière va prendre fin et je suis fier de ce que j’ai fait dans le milieu des Voilures tournantes.

Mon palmarès est très honorable : 12 726 heures d’hélicos et 262 heures d’avions. Médaille de l’Aéronautique en l’an 2000 proposée par Jean Boulet et Jean Moine, Chevalier de la Légion d’Honneur proposé par Patrick Baudry. Je suis également membre du GFH, de la FFG et à Albi membre de la CAJ (Constructeurs d’Aéronefs Jeunes) dirigé par Alain Flament et membre de GEM HORIZON où je donne un coup de main pour des personnes ayant des troubles psychiques.

Voilà c’est mon histoire qui, je l’espère, vous aura plu.

Vos commentaires

  • Le 1er novembre 2014 à 01:35, par François BLANC En réponse à : Jean-Marie Potelle alias Papycoptère

    Salut Jean-Marie !
    Bien content que ce site t’ait permis de raconter ton parcours. Je garde pour ma part un très bon souvenir de la période où nous avons pas mal échangé sur ce qu’il serait bon de faire pour "placer" de l’hélicoptère dans les revues d’aéronautique en France…
    Ce serait sympa de se revoir, sinon d’échanger par le canal informatique. Prends soin de toi !
    Amitiés
    François Blanc
    Pdt de l’Association des journalistes professionnels
    de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE).

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  • Le 20 août 2022 à 15:00, par Morel En réponse à : Jean-Marie Potelle alias Papycoptère

    J’étais très intéressé de lire votre parcours de vie est très intéressant et riche en milieu aéronautique. Et si je me permets de vous écrire c’est que votre nom ne m’est pas inconnu car il me semble bien en avoir entendu parler par mon père à l’époque. Qui était le capitaine André Morel ancien de L’AT et ancien directeur de Gyrafrance.
    Mais rester pour ces beaux parcours de vie dans le milieu de l’aéronautique
    Cordialement
    Philippe Morel

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