Les pilotes d’hélicoptère perdraient-ils l’équilibre ?

vendredi 29 septembre 2006

Chez l’homme, l’équilibre est fondé sur plusieurs organes et récepteurs sensoriels. Le bruit ambiant et les vibrations des hélicoptères
sont capables d’en perturber certains, dont l’oreille, non seulement dans sa partie auditive, mais aussi dans sa partie vestibulaire dans laquelle se trouve l’un de nos centres de l’équilibre. Perturber l’oreille, c’est altérer l’orientation spatiale des personnels et les mettre en danger, en théorie…

Une étude menée par Morin et al. Sur une trentaine de pilotes militaires expérimentés (2300 heures de vol en moyenne) suivis aux Hôpitaux d’Instruction des Armées de Bordeaux et de Percy et volant sur divers
types d’appareils (Puma, Gazelle, Alouette, Fennec, Ecureuil) a en effet démontré que ce n’était pas si simple.

Lors de la visite d’aptitude, différents tests permettant d’étudier leur équilibre ont été effectués. La vidéonystagmographie a révélé que 67 % des pilotes de Puma présentaient une diminution du fonctionnement de leur vestibule. Les pilotes de Gazelle étaient aussi concernés, mais dans une moindre mesure. Cela ne signifie pas pour autant que l’équilibre de ces pilotes est défaillant : en fait, ils font d’avantage appel, pour se repérer dans l’espace, à d’autres récepteurs sensoriels parmi ceux suspendus sur la représentation caldérienne de l’équilibre, et en particulier à la vision. L’Equitest, test global analysant chaque élément participant à notre équilibre, a confirmé cette analyse en montrant l’utilisation préférentielle par les pilotes des informations visuelles lors de la gestion de leur équilibre.

Grâce à la caméra infra-rouge, on s’est aperçu que de nombreux pilotes possédaient une stratégie particulière de déplacement des yeux qui anticipent les mouvements à venir : ce sont les saccades d’anticipation.
De plus, la cinétique oculaire en réponse à des déplacements était excellente. Cela s’explique par l’habituation lors de l’exercice de
leur profession : leur vision régulièrement stimulée lors des vols à basse altitude avec défilement rapide du paysage les a rendus très performants lors de ce type de situation.

Un autre test permet de tester le système otolithique sensible à la position de la tête par rapport à la gravité et aux accélérations linéaires qui sont des paramètres importants lors des vols. Ce test était parfois anormal,
surtout chez les pilotes de Gazelle et de Puma, peut-être du fait du bruit et des vibrations plus importants sur ces aéronefs.

Il serait intéressant de comparer ces données à celles obtenues chez des pilotes moins expérimentés car les modifications des stratégies d’équilibration se feraient autour de 100 à 150 heures de vol. Comme
les funambules, c’est l’apprentissage et l’expérience qui rendent les pilotes si performants en matière d’utilisation des informations visuelles pour le maintien d’un équilibre parfait. Certains tests sont néanmoins altérés du fait des nuisances sonores et vibratoires de quelques aéronefs, sans compromettre la stratégie globale d’équilibration garante de la sécurité du vol. Des études plus poussées seraient donc utiles. Une étude de Kossowski et al. Consacrée au versant auditif de la profession a démontré que les pilotes militaires étaient à haut risque de perte auditive, comparés aux pilotes civils. Ces observations rendent nécessaire l’amélioration des moyens de protection auditifs. Des mesures mécaniques et ergonomiques sont tout aussi nécessaires lors de la conception des appareils pour éviter l’altération du système vestibulaire. source

Docteur Michel BALLESTER

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