L’Afghanistan se prépare ici

mercredi 20 avril 2011

Armée « Béarnistan », un vaste exercice de préparation, a lieu jusqu’à jeudi en Béarn avant le départ des militaires pour Kaboul. Seul régiment doté de cette arme, le 5e RHC abrite désormais plus d’une quinzaine d’hélicoptères Tigre.

Béarnistan. C’est le nom de code attribué à l’exercice militaire réunissant depuis samedi et jusqu’à demain, en Béarn, des membres des régiments d’hélicoptères de combat du 5e RHC de Pau-Uzein et du 3e RHC d’Etain (Meuse).

Quatre-vingts hommes, femmes et divers appareils, dont les fameux Tigre, se préparent à assurer dès juin prochain, et pour six mois, la relève des hélicoptères français surveillant la région de Kaboul.

L'exercice « Béarnistan » prendra fin jeudi pour les 80 militaires - Photo © Nicolas SabathierLà-bas, dans un contexte très tendu puisque des talibans ont attaqué un bâtiment ministériel pas plus tard que lundi, c’est le colonel Bruno-Mikaël Nicolas qui dirige la quinzaine d’appareils du bataillon national « Bathélico » de la Task Force Mousquetaire, déployés dans le cadre de « l’opération Pamir ».

La relève du colonel Nicolas, chef du 5e RHC
Mais, bientôt, le futur ex-chef de corps du régiment béarnais et ses hommes seront remplaçés.

D’où la nécessité « de se préparer sérieusement lors d’un ultime exercice opérationnel très dur avant notre projection à Kaboul », expliquait hier, depuis Pau-Uzein, le colonel Frédéric Beutter, 40 ans.

Ce chef de corps du 3e RHC d’Etain est appelé à bientôt tenir les rênes en Afghanistan au terme d’une préparation longue de six mois « éprouvante pour tous, y compris nos familles ».

Aux yeux de cet ancien Saint-Cyrien, aucune approximation n’est envisageable. « L’engagement en opération sur le territoire afghan est, comme en Côte d’Ivoire, un exercice très difficile. Il faut donc être prêt et nous sommes là pour ça ».

40% de l’effectif issu du régiment béarnais
En plus des personnels, la remarque vaut aussi pour les différents aéronefs concernés (Puma, Cougar, Gazelle...), environ 40 % de l’effectif étant issu du régiment béarnais. D’autres appareils, dédiés aux forces spéciales dont le commandement de la brigade terre est aussi basé à Pau, complètent le dispositif.

Dans la zone tout autour de la capitale afghane placée sous surveillance française, les appareils aux couleurs tricolores sont très sollicités.

Les appareils sont stationnés au Quartier de Rose à Pau-Uzein- Photo © Nicolas SabathierA titre d’exemple, le colonel Beutter est brièvement revenu hier sur la perte (exceptionnelle) d’un hélicoptère Tigre survenue début février dans le cadre d’une opération d’escorte effectuée de nuit, à 30 kilomètres de Kaboul.

« Voilà pourquoi l’exercice Béarnistan, que nous faisons ici, est une opération de synthèse destinée à mettre le point final à notre préparation à la fois en termes techniques, tactiques mais aussi humains et pour l’ensemble du bataillon », a-t-il indiqué.

Régulièrement engagés au feu
Dans la foulée, le colonel Beutter s’est autorisé, devant les médias, à lever un coin de voile sur les difficultés rencontrées par les pilotes mais aussi l’ensemble des personnels militaires français : « Nos hélicoptères volent tous les jours, dans le cadre d’alertes quotidiennes. Régulièrement engagés au feu, ils ne sont souvent pas loin des tirs ennemis ». Il en va notamment ainsi pour les Tigre palois, dont l’armement est pourtant « important et très dissuasif ».

« L’engagement en Afghanistan est, comme en Côte d’Ivoire, un exercice très difficile » Colonel Frédéric Beutter

Le colonel Frédéric Goût devient le nouveau chef du 5e RHC
En Béarn depuis mi-2009, le colonel Bruno-Mikaël Nicolas sera en juillet prochain arrivé au terme de son temps de commandement. A 41 ans, le « patron » du 5e RHC, brillant polytechnicien, passera la main, le 5 juillet, au colonel Frédéric Goût. Agé de 42 ans, le futur chef de corps du plus important régiment béarnais se trouve actuellement à Paris, au sein de l’état-major de l’Armée de terre.

C’est précisément là que, dès son retour d’Afghanistan, le colonel Nicolas prendra aussi sa prochaine affectation. De source militaire, cet officier de haut rang y occupera l’un des postes les plus en vue de l’état-major national.

Toujours plus de Tigre à Pau-Uzein
Le 5e RHC, « régiment du Béarn » tel qu’il aime se définir, est la seule unité au monde disposant d’une flotte de Tigre. Ce bijou de très haute technologie, d’un coût variant « entre 25 et 30 millions € selon le niveau d’armement » a-t-on entendu hier, est une arme dissuasive capable de performances inégalées et très sollicitée sur le théâtre afghan (lire par ailleurs).

Véritable plateforme de tir embarquée, l’hélicoptère Tigre est fabriqué par la société Eurocopter qui vient de livrer son 27e exemplaire.

En incluant ceux qui se trouvent en opérations extérieures, pas moins de 17 de ces appareils sont aujourd’hui stationnés au Quartier de Rose, à Pau-Uzein. Ce total englobe aussi les appareils nécessaires au 4e RHFS (forces spéciales) également basé en Béarn.

La flotte est abritée sous de vastes hangars conçus par l’établissement du Génie (à Bordeaux) pour plus de 38 millions €.

Un simulateur « révolutionnaire »
Le simulateur de vol permet aux pilotes de s'entraîner à Pau, y compris sur les Tigre - Photo © Nicolas SabathierPour l’entraînement et la formation des pilotes, un bâtiment spécifique abrite le centre de simulation. On y travaille ici « en complément des heures de vols réelles même si la simulation joue un rôle central », indiquent les autorités militaires.

« Il s’agit d’un effort considérable », précise-t-on même à l’état-major « pour le 5e RHC qui est devenu un régiment pionnier dans l’appropriation de ces nouvelles technologies ». Grâce à deux postes d’entraînement indépendants, les équipages des appareils Tigre bénéficient bien sûr eux aussi des possibilités offertes par ce simulateur qualifié de « révolutionnaire ».

Un « gunner » blessé à l’épaule
Sous réserve des pertes subies par les commandos des forces spéciales, il serait le premier militaire français de l’Alat (1) blessé au combat depuis l’arrivée des forces françaises en Afghanistan. Pas plus tard que la semaine dernière à l’est de Kaboul, dans la zone sous commandement français, le « gunner » (tireur embarqué) d’un hélicoptère Cougar « a été victime d’un accrochage avec des insurgés » révèlent les autorités militaires. L’attaque, au cours de laquelle ce militaire basé à Pau a été blessé au niveau de l’épaule, est survenue « lors d’une évacuation médicale difficile ». Rapatrié et aujourd’hui soigné à Paris, ce soldat béarnais rattaché au 5e RHC a vraisemblablement eu la vie sauve grâce à son équipement.

Des Palois en « zones hostiles »
Le bataillon d’hélicoptères français servant en Afghanistan bénéficie depuis peu de l’aide apportée par des pelotons spécialisés dans la reconnaissance et le balisage (PRB). On a appris qu’une dizaine d’hommes, âgés entre 19 et 35 ans, ont quitté Pau récemment pour accomplir ces missions délicates.

Elles consistent notamment « à préparer les poser (atterrissage) d’hélicoptères en zones hostiles », explique le colonel Frédéric Beutter, futur chef de corps du bataillon tricolore à Kaboul. Très entraînés, et utilisant des techniques proches de celles appartenant aux commandos des forces spéciales, les membres de ce peloton séjourneront deux trimestres en Afghanistan.

Nouveau boss aux forces spéciales ?
Comme en sport, le « mercato » des généraux de l’armée française ne va pas tarder à débuter. Selon Jean-Dominique Merchet, spécialiste reconnu des questions de défense, le prochain patron national du commandement des opérations spéciales pourrait venir de Pau. Candidat très en vue, il s’agit du général Hugues Delort-Laval, actuel délégué militaire départemental pour les Pyrénées-Atlantiques depuis juillet 2009. Ce fils d’une grande famille d’officiers commande à Pau la brigade des forces spéciales Terre. L’autre candidat à la succession du général Beth est le général Gomart, actuel coordonnateur national du renseignement à l’Elysée. Gérard Cayron source

(1) Il s’agit de l’aviation légère de l’armée de terre qui englobe notamment les 5e RHC et 4e RHFS (forces spéciales) de Pau.
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Pau : opération Béarnistan

Cette opération est la dernière étape d’un entraînement exigeant de six mois pour les équipages d’hélicoptères qui prendront le relais de leurs camarades fin mai en Afghanistan.
Dans la salle des opérations, les pilotes étudient le terrain - Photo Guillaume BonnaudAu sud de Tarbes ou dans la région de Lourdes, il se pourrait que les habitants observent dans les villages ou sur les routes de curieux personnages vêtus en paysans afghans ou en tenue paramilitaire. Ces hommes ne sont pas des talibans égarés en Pyrénées-Atlantiques mais les figurants (en fait une dizaine de militaires) de l’opération Béarnistan, organisée du 17 au 21 avril dans le département.
Sur le tarmac, à l'avant-plan : une Gazelle, à l'arrière-plan : un Tigre ; ils seront prêts au décollage en 30 minutes maximum - Photo Guillaume BonnaudCette opération est la dernière étape d’un entraînement exigeant de six mois pour les équipages d’hélicoptères qui prendront le relais de leurs camarades fin mai en Afghanistan.
Ils sont 80, réunis jusqu’à demain sur la base aérienne du 5e RHC de Pau. Un groupe composé d’hommes du bataillon palois mais aussi de soldats du 3e RHC d’Étain (Meuse) et de l’armée de l’air venus spécialement pour l’occasion.

« Ça ressemble à Kaboul »
Préparation d'une Gazelle - Photo Guillaume BonnaudMais revenons à nos faux paysans afghans. L’objectif pour les pilotes basés à Pau et en état d’alerte permanente est d’être capables de décoller en moins de trente minutes pour des missions qui consistent, par exemple, à localiser et évaluer la dangerosité de ces personnes. Des insurgés potentiels qu’il s’agira peut-être de « prendre en charge », explique le capitaine Guillaume Besançon-Rouge. Entendez, de neutraliser par les armes s’il le faut. Bien entendu, aucun tir n’est effectué au cours de cette opération d’entraînement.
Le pilote aux commandes du Tigre BIE - Photo Guillaume BonnaudMais à part le feu des armes, tout y est. Au premier étage d’un bâtiment de la base de Pau, une « salle des opérations » bourdonne des échanges concentrés d’une trentaine de soldats. Devant une carte du secteur, certains étudient le terrain. D’autres, non loin de là, écoutent par radio les messages des camarades en vol. Aux tables, d’autres encore potassent les documents décrivant le pseudo-contexte de combat du Béarnistan. « Il n’y a rien de tel que d’être sur le terrain, juge une pilote de Caracal (hélicoptère de transport) qui a déjà effectué une mission en Afghanistan. Mais oui, ici ça ressemble à Kaboul. Le briefing alerte, c’est le même. »
C’est aussi pour des raisons de crédibilité que l’opération se déroule dans notre secteur. « Ici, avec la chaleur et les sommets à 2 800 mètres, les conditions sont plus proches de la réalité du terrain afghan ; Kaboul est entourée de montagnes de 4 000 m », rappelle commandant Houzé, du 3e RHC d’Étain. Un « Meusistan » aurait probablement été moins réaliste : « chez nous, en Meuse, on a des collines de 280 m », glisse encore le militaire.

Des « insurgés » à Tarbes
Le nom de l’opération lui-même fait partie de la mise en condition des troupes, explique le lieutenant-colonel Beutter qui dirige l’entraînement : « c’est pour les plonger dans l’ambiance culturelle ».
Ready to take off - Photo Guillaume BonnaudCe gradé qui prendra bientôt les commandes du bataillon Mousquetaire (lire ci-contre) aura aujourd’hui une pression toute particulière sur les épaules. « Le général commandant de la division aéromobile du commandement des forces terrestres vient de Lille pour contrôler la capacité opérationnelle du bataillon. Je vais lui prouver que Mousquetaire est prêt en déroulant des exercices. Il y aura une mission d’évacuation médicale pour simuler le sauvetage d’un fantassin blessé. Je vais aussi dérouler toute une mission de renseignement en profondeur sur la présence ’’d’insurgés’’ au sud de Tarbes ».
Le Tigre, suivi par une Gazelle, décolle pour rejoindre - Photo Guillaume BonnaudSauf énorme cafouillage, le général devrait valider le travail de préparation réalisé depuis six mois. Le bataillon Mousquetaire de Kaboul pourra alors accueillir la relève.

25 millions
C’est en euros le prix d’un hélicoptère de combat Tigre. Le 5e RHC de Pau en possède 17. En Afghanistan, chaque appareil effectue 400 heures de vol en moyenne avant d’être rapatrié en France pour des opérations de maintenance.

Les Mousquetaires en Afghanistan
Photo Guillaume BonnaudLe bataillon d’hélicoptères français engagé en Afghanistan porte le nom de Mousquetaire. Il rassemble 136 soldats issus des 3e et 5e RHC et de l’armée de l’air. Son équipement comprend trois hélicoptères d’attaque Gazelle, deux Cougar (transport de troupes), deux Caracal (transport) et trois Tigre (combat) venus de Pau, Il est commandé par le colonel Nicolas, chef de corps du 5e RHC de Pau, qui devrait rejoindre l’état-major de l’armée de terre. Début juin, c’est le lieutenant-colonel Beuttner, du 3e RHC d’Étain qui lui succédera pour six mois. Céline Dupeux source

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